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Title: La Bibliothèque Canadienne, Tome VI, Numero 1, Decembre, 1827.

Date of first publication: 1827

Author: Michel Bibaud (editor)

Date first posted: Mar. 7, 2021

Date last updated: Mar. 7, 2021

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La Bibliothèque Canadienne


Tome VI. DECEMBRE, 1827. Numero 1.

  Pour deux raisons, en qualité d’auteur,

Je dois un mot, une épitre au lecteur;

Car c’est demain qu’un nouvel an commence,

Et je parais pour la première, fois

Au Tome VI de l’œuvre démon choix,

Non ivre d’heur, mais repu d’espérance.

  Dans la carrière où mon esprit s’avance,

J’ai rencontré maint obstacle à dompter;

Le préjugé rebelle à l’évidence,

Le mauvais goût hostile à la science,

Et la lésine, autant à redouter,

Et par-dessus, la rustique ignorance,

Ne comprenant rien que l’impertinence,

L’injure sale et la grossièreté.

  D’une autre part, la libéralité,

L’amour du vrai, l’aimable, bienveillance,

Le gout des arts, prompts à favoriser,

Mon faible essai pour instruire, amuser,

En m’accueillant avec grâce, indulgence,

Se sont acquis des droits accumulés

A mon estime, à ma reconnaissance,

A des efforts de ma part redoublés.

  Mais en faisant nos dus remercimens,

N’oublions pas, par grande inadvertance,

Les bons souhaits, les justes complimens,

Dont nul prétexte, en ce temps, ne dispense.

A nos lecteurs, d’un sincère désir,

Souhaitons donc un heureux avenir;

Des maux passés la parfaite oubliance,

Des biens présents la pleine jouissance,

De tout malheur l’entière exemption,

Des maux cuisants, des noirs soucis l’absence;

Dans le maintien la grâce et la décence,

Dans le parler la persuasion,

Et dans l’esprit le grain de sapience;

Un sort enfin digne d’être envié;

Et pour ne point moi-même être oublié,

Dans ce bonheur, celte heureuse existence,

Incontinent, plus d’un associé.

HISTOIRE DU CANADA.

Les Anglais s’étaient établis entre les rivières Kennebec et Pentagoet, en un lieu nommé Pemkuit, où ils avaient un fort de pieux, construit avec assez de régularité, et monté de vingt canons. Ils incommodaient extrêmement de là tous les sauvages des environs, et faisaient craindre à M. de Manneval, gouverneur de l’Acadie, l’effet de leurs intrigues pour détacher ces peuples de l’alliance des Français. Cette crainte était pourtant mal fondée, et les Abénaquis ne tardèrent pas à lui donner des preuves de leur fidélité à leurs premiers engagmens. Les Cannibas, soit à l’instigation de M. Thury, leur missionnaire, soit de leur propre mouvement, formèrent un parti de cent guerriers, qui se mirent en campagne, le 9 Août 1689, pour chasser les Anglais de Pemkuit. Ils firent le voyage par mer, le long de la côte, et allèrent débarquer à deux lieues du fort. De là, ils s’avancèrent par terre, avec tant de précaution, qu’ils arrivèrent aux premières habitations anglaises sans avoir été apperçus. Ils attaquèrent d’abord le village avec furie, brisèrent les portes des maisons, massacrèrent ceux des habitants qui leur opposèrent de la résistance, et firent les autres prisonniers.

Au premier bruit d’une attaque si brusque et si imprévue, le commandant du fort fit tirer tout son canon: les sauvages s’éloignèrent un peu, et se retranchèrent derrière un rocher, d’où ils firent un si terrible feu dé mousqueterie sur le fort, que personne n’osa s’y montrer à découvert. La nuit étant venue, ils sommèrent le commandant de leur livrer sa place; celui-ci ne s’étant pas montré disposé à le faire, le feu recommença de part et d’autre: les sauvages s’approchèrent du fort, à la faveur des ténèbres, et le feu recommença dès la pointe du jour: mais après quelques décharges, les Anglais cessèrent de tirer, et demandèrent à capituler. Les sauvages s’approchèrent aussitôt, et jurèrent qu’ils ne feraient de mal à personne, pourvu que la garnison sortît sur le champ de la place. Le commandant parut, un moment après, à la tête de quatorze hommes, et de quelques femmes, tous portant un paquet sur le dos. Les Cannibas les laissèrent passer sans toucher à rien, et se contentèrent de leur dire que, s’ils étaient sages, ils ne reviendraient plus. Ils entrèrent ensuite dans le fort, qu’ils rasèrent, ainsi que les maisons d’alentour, après en avoir enlevé ce qui était le plus à leur bienséance, et s’en retournèrent sur deux chaloupes, dont ils s’étaient emparés, après en avoir tué les équipages;

Cette expédition ne tarda pas à être suivie d’une autre encore plus vigoureuse, comme s’exprime Charlevoix, et qui causa une plus grande perte aux Anglais. Ceux-ci avaient, au voisinage du Kennebec, quatorze petits forts assez bien munis: les sauvages des environs de Pentagoët et de la rivière St. Jean les surprirent tous, y tuèrent jusqu’à deux cents personnes, et en rapportèrent un riche butin. Ce fut, il paraît, le pendant du massacre qui venait d’être exécuté à La Chine: il est très probable que les Abénaquis n’épargnèrent pas plus les femmes et les enfans, dans cette expédition, que n’avaient fait les Iroquois dans l’île de Montréal; et, quoiqu’en puissent dire les historiens partiaux du temps, l’acte des uns ne mérite pas moins que celui des autres l’exécration de quiconque n’est pas dépourvu de tout sentiment d’humanité.

Ces expéditions cruelles furent suivies de quelques autres qui ne le furent guères moins, bien qu’elles fussent dirigées par des Français. Hors d’état de tenter la conquête de la Nouvelle York, le comte de Frontenac crut qu’il convenait de donner du moins de l’occupation aux habitans de cette province, dans leurs propres foyers. En même temps qu’il cherchait à regagner les Iroquois, au moyen de négociations, comme nous le verrons bientôt, il prenait ses mesures pour lever trois partis de guerre, qui devaient entrer par trois endroits différents, dans le pays anglais. Le premier, formé à Montréal, et composé de cent dix hommes, Français et sauvages, eut pour commandans M. M. d’Aillebout de Mantet et Lemoyne de Ste. Hélène, tous deux lieutenans de troupes, sous lesquels M. M. de Repentigny, d’Iberville de Bonrepos et de Montigny voulurent bien servir en qualité de volontaires. Ce parti se mit en campagne avant d’avoir délibéré de quel côté il tournerait ses armes. Il était destiné pour la Nouvelle York, mais M. de Frontenac avait laissé aux commandans le choix du poste qu’ils devaient attaquer; et ceux-ci ne jugèrent pas à propos de se déclarer avant qu’on fût près d’entrer dans le pays ennemi. Ce ne fut qu’après cinq ou six jours de marche qu’ils tinrent conseil sur ce qu’ils devaient faire.—Les Français furent d’avis d’aller droit à Orange; mais les sauvages rejettèrent cette proposition; et bon continua de marcher jusqu’à un endroit où aboutissaient deux chemins, dont l’un, conduisait à Orange et l’autre à Corlar: alors M. de Mantet, désespérant de faire changer de sentiment à ses alliés, leur proposa l’attaque de la dernière de ces deux places, et ils l’agréèrent.—On prit aussitôt le chemin de Corlar, et au bout de neuf jour d’une marche des plus fatiguantes, on arriva à deux lieues de la place. Quelques femmes sauvages, que l’on rencontra alors, donnèrent tous les renseignemens dont on avait besoin. On fit de plus reconnaître les approches de la place par le nommé Giguièré, Canadien, accompagné de quelques sauvages, et l’on résolut de l’attaquer sur le champ. Comme il était nuit, et que les commandans avaient ordonné le plus profond silence, la petite armée put entrer dans le bourg sans que ses habitans s’en apperçussent. Alors on fit le cri de guerre, à la manière des sauvages, et chacun donna fie son côté. On ne trouva guères de résistance qu’à une espèce fort, qui était au milieu de la place, et dont la garnison fit pendant quelque temps un feu assez vif sur les assaillants; mais enfin la porte de ce fort ayant été enfoncée, tous ceux qui le défendaient furent passés au fil de l’épée. Montigny ayant attaqué une maison où un nombre d’hommes s’étaient retranchés, reçut dans le corps et au bras deux coups de pertuisane qui le mirent hors de combat. Mais Ste. Hélène étant survenu, la maison fut forcée, et les blessures de Montigny furent vengées par la mort de tous ceux qui s’y étaient renfermés. “Bientôt,” continue Charlevoix, “ce ne fut que massacre et pillage” dans le bourg: le ministre du lieu, et un nombre d’hommes, de femmes et d’enfans, périrent dans cette boucherie, où ni âge ni sexe ne furent épargnés. Le commandant de la place, qui s’était rétiré de l’autre côté de la rivière, avec ses domestiques, quelques soldats et des sauvages, mit bas les armes, le lendemain, sur la sommation qui lui en fut faite par d’Iberville et le Grand Agnier, chef des sauvages de l’expédition. Toutes les maisons du bourg, à l’exception de celle du commandant et celle d’une veuve, où l’on avait transporté Montigny, furent brûlées. Enfin, on s’abstint de massacrer une soixantaine de personnes, la plupart femmes, enfans et vieillards, “qui avaient échappé à la première furie des assaillans.” On accorda de même la vie à une trentaine d’Iroquois, pour faire voir à leur nation qu’on n’en voulait qu’aux Anglais.

Après un si terrible exploit, on sentit qu’il n’était pas prudent à une centaine d’hommes de demeurer longtemps dans le voisinage d’Orange, qui n’était qu’à six lieues de là; aussi reprit-on de suite le chemin du Canada. Mais bientôt les vivres, dont on avait négligé de se pourvoir suffisamment, venant à manquer, on fut contraint de se séparer: quelques uns furent attaqués; et dix-sept Français et trois sauvages furent tués; de sorte que ce parti perdit beaucoup plus dans la retraite qu’à l’attaque de Corlar, où il n’avait eu que deux hommes de tués, et un officier de blessé.

Les deux autres partis furent levés, l’un dans le gouvernement des Trois-Rivières, et l’autre dans celui de Québec. On ne put tirer du gouvernement des Trois-Rivières, alors très peu peuplé, que cinquante-deux hommes, y compris cinq Algonquins et vingt Sokoquis. Le sieur Hertel, dont il a déjà été parlé, fut mis à la tête de cette petite troupe: il avait avec lui ses trois fils et ses deux neveux, les sieurs Gatineau et Crevier de St François.

Il partit des Trois-Rivières le 28 Janvier 1690, et arriva le 27 Mars près d’une bourgade anglaise que Charlevoix appelle Sementels. Alors il partagea sa troupe en trois bandes: la première eut ordre d’attaquer une grande maison fortifiée; et la seconde, de se saisir d’un fort de pieux à quatre bastions, tandis qu’avec la troisième, il attaquerait un fort plus grand, où il y avait du canon. Tout cela fut exécuté avec autant d’habileté que de bravoure. Les Anglais parurent d’abord vouloir se défendre; mais ils ne soutinrent pas le premier feu des assaillans: les plus braves furent tués, et les autres, au nombre de cinquante-quatre, se rendirent prisonniers de guerre. On mit le feu aux maisons, ainsi qu’aux étables, où il périt deux mille pièces de bétail. Charlevoix ne dit pas ce que devinrent les femmes et les enfans.

Quoiqu’il en soit, Sementels n’était éloigné que de six lieues d’une assez grosse bourgade de la Nouvelle Angleterre, nommée Pescadoët, d’où il pouvait sortir assez de monde pour envolopper Hertel et lui couper la retraite. En effet, dès le soir du même jour, deux sauvages vinrent l’avertir que deux cents hommes s’avançaient pour l’attaquer. Il se mit en bataille sur le bord d’une rivière où il y avait un pont, dont il fit occuper la tête; et les Anglais s’étant présentés pour le passer, il les laissa avancer sans tirer un seul coup; puis, fondant sur eux, l’épée à la main, il en tua ou blessa dix-huit, et obligea le reste à lui céder le champ de bataille, n’ayant eu, de son côté, que deux hommes de tués, du nombre desquels était son neveu, Crevier, et un (son fils ainé, nommé Lafreniere,) de blessé.

Après cet exploit, M. Hertel crut devoir songer à la retraite. Au bout de quatre jours, ayant eu avis qu’il n’était éloigné que de deux lieues du parti de Québec, il résolut d’aller le joindre avec ce qu’il lui restait de monde, après avoir dépêché Gatineau au gouverneur-géneral, pour lui apprendre le succès de son entreprise, et permis au sieur Maugras, qui lui avait amené ses cinq Algonquins, de s’en retourner avec eux à St. François.

Ce troisième parti avait pour commandant le lieutenant De Portneuf, troisième fils du baron de Békancour, lequel avait sous lui le sieur Tilly de Courtemanche. Il se composait de quelques Canadiens et de soixante Abénaquis du Sault de la Chaudière. M. de Portneuf devait y joindre la compagnie que commandait son frère ainé, M. de Manneval, gouverneur de l’Acadie. Il était parti de Québec, le même jour que M. Hertel avait laissé les Trois-Rivières, et il n’avait pu encore rien entreprendre. Il arriva vers la mi-mai, avec son renfort, sur les bords du Kennebec, où il se fit joindre par d’autres sauvages; et le 25 il alla camper à quatre lieues d’un fort anglais situé sur le bord de la mer, et appellé Kaskebé par Charlevoix. Ce fort était bâti assez régulièrement, et était défendu par une garnison dé plus de cent hommes et huit pièces de canon. Les Français s’en approchèrent pendant la nuit, et s’annoncèrent par des cris de guerre. Cinquante hommes de la garnison étant sortis pour repousser les assaillans, il y en eut quarante-six de tués, et les quatre autres rentrèrent blessés dans la place. Sur le soir, Portneuf envoya sommer le commandant de se rendre; mais celui-ci ayant répondu qu’il était déterminé à se défendre jusqu’à la mort, il fut résolu qu’on assiégerait le fort. Dans la nuit du 26, les assiégeons se logèrent à cinquante pas de la place, derrière une espèce de morne, où ils n’avaient rien à craindre du canon. La nuit suivante, ils ouvrirent la tranchée. Les Canadiens, non plus que les sauvages, n’avaient aucune expérience de cette manière d’attaque; mais le courage et le désir de vaincre suppléèrent au manque d’habileté: tous travaillèrent avec ardeur, et l’ouvrage avança avec tant de vitesse, que dès le soir du 28, les assiégés demandèrent à parlementer. Il leur fut déclaré qu’on voulait avoir le fort avec tout ce qu’il contenait de munitions et de vivres. Ils demandèrent six jours pour délibérer, espérant, sans doute, d’être secourus dans l’intervalle; mais on ne leur accorda que la nuit, et l’on continua de pousser la tranchée. Le lendemain, on jetta du fort une quantité de grenades, qui ne firent presque aucun effet, et les assiégeans s’approchèrent encore de la palissade, à couvert de leur tranchée, avec une barique pleine de goudron et d’autres matières aisées à s’enflammer. Les assiégés ne voyant aucun moyen d’empêcher l’effet de cette machine, arborèrent un pavillon blanc. M. de Portneuf fit dire au gouverneur qu’il n’y avait plus d’autres conditions à espérér pour lui que de se rendre prisonnier de guerre, avec toute sa garnison. Il sortit sur le champ du fort, avec tout son monde, qui se montait à soixante-dix hommes, sans compterles femmes et les enfans.

A peine Kaskebé était-il évacué, qu’on découvrit quatre bâtimens anglais, qui venaient, comme on l’apprit ensuite, avec des troupes, pour secourir la place, mais qui ne voyant ni pavillons ni signaux, prirent le parti de revirer de bord. M. de Portneuf fit enlever les canons du fort, y prit tout ce qui s’y trouva à sa bienséance, et y fit mettre le feu; après quoi, il fit aussi réduire en cendres toutes les maisons à deux lieues à la ronde. La plupart des prisonniers demeurèrent entre les mains des sauvages; les plus marquants d’entr’eux seulement furent conduits à Québec, où le parti arriva le 23 Juin.

Dans le même temps que ces partis étaient en campagne ou en route pour s’en revenir, Tilly de Beauvais, lieutenant, et Labrosse, lieutenant réformé, s’avisèrent, avec quatre autres Français, de lever un parti d’Iroquois chrétiens, à la tête desquels se mit le Grand Agnier. Ayant remonté la rivière de Sorel, ils rencontrèrent, dans deux cabannes, quatorze Iroquois, qu’ils firent prisonniers. S’étant ensuite avancés, par terre, vers un fort anglais, qu’ils avaient dessein d’attaquer, ils rencontrèrent un autre parti, composé d’Anglais et de sauvages, lui tuèrent quatre hommes et deux femmes, et lui firent quarante-deux prisonniers. Mais ayant eu avis que sept cents Mahingans les attendaient, à une journée de marche, ils jugèrent à propos de faire retraite, ne voulant pas s’exposer, embarrassés comme ils l’étaient de la garde de leurs prisonniers, aux risques d’un combat trop inégal. Ils se trouvèrent bientôt sur les bords de la rivière aux Saumons; et comme ils avaient laissé leurs canots assez loin de là, ils crurent que le plus court était d’en fabriquer d’autres. Le soir, ils furent découverts par un parti d’Algonquins et d’Abénaquis, qui allaient aussi en guerre contre les Anglais, et qui les prenant pour des ennemis, les chargèrent. Le grand Agnier fut tué d’abord avec un des siens; six autres Iroquois, deux Français et deux captifs angla’s furent blessés, et l’on fit quelques prisonniers de part et d’autre. Ce fut alors qu’on se reconnut. Le regret fut extrême des deux côtés: mais les Iroquois ne pouvant se consoler de la perte de leur chef, refusèrent de rendre les prisonniers qu’ils avaient faits. Ce refus piqua les autres; et comme ce ressentiment mutuel pouvait avoir des suites fâcheuses, le gouverneur-géneral crut devoir intervenir dans le différent et il eut besoin de toute sa prudence et de toute son habileté, pour détourner l’orage qui menaçait d’éclater.

Le comte de Frontenac était revenu en Amérique persuadé qu’après la conquête de la Nouvelle York, ce qu’il pouvait faire de plus avantageux pour la colonie dont il reprenait le gouvernement, était de regagner les Iroquois, et il espérait d’y réussir au moyen des chefs de cette nation, qu’il avait ramenés de France, et surtout d’Oureouharé, le plus apparent d’entr’eux, dont il s’était acquis d’estime et l’amitié. Il l’avait mené avec lui à Montréal, et par son conseil, il avait renvoyé quatre des compagnons de sa captivité, avec Gagniégaton, qui avait été député vers M. de Dénonville, aux cinq Cantons, pour les avertir du retour de tous leurs chefs, et leur dire, de la part d’Oureouharé, qu’ils trouveraient dans le gouverneur géneral beaucoup d’estime et de tendresse, comme par le passé, et que pour lui, il ne retournerait dans son pays que quand on serait venu le redemander à Ononthio.

A l’arrivée de ces députés, les Cantons s’assemblèrent, et ils envoyèrent leur réponse par le même Gagniégaton. Il arriva à Montréal le 9 Mars 1690; mais il n’y trouva ni M. de Frontenac, ni Oureouharé, qui étaient retournés à Québec, et le chevalier de Callières ne put d’abord rien tirer de lui, non plus que de ceux qui l’accompagnaient.

(A continuer.)

PETITE BIOGRAPHIE des DEPUTE’S de FRANCE.

QUATRIEME EXTRAIT

Haudicourt (Cavé d’.) Sans entrer dans des détails oiseux sur M. d’Haudicourt, nous retracerons sa carrière politique en ce peu de mots....le deux-cent dixième de cette Biographie.

Haudry de Soucy. M. Odry, le chantre des gendarmes, fait comme on sait de très beaux vers; M. Haudry lé député ne fait lui, que de la prose; l’un est auteur de la Boite au gros sel, et l’autre est administrateur des salines: enfin le premier fait les délices de la scène et du parterre, et le second représente la Seine et Oise. Gardez-vous de confondre.

Hauteroche (d’.) C’est un excellent cultivateur qui, depuis le commencement de sa carrière législative, n’a jamais abandonné le terrain ministériel.

Hay-Lucy. Il a une tendresse particulière pour tous les vicaires de campagne, et il demanda plusieurs fois que leurs appointemens fussent augmentés. Depuis quelque temps, M. Hay-Lucy ne parle plus; est-ce que tous ses amis les vicaires seraient devenus curés?

Hays (du.) Il ne manque pas une séance de là chambre; il est vrai qu’il n’y fait rien; mais enfin, il est toujours là.

Hennessy. Il a une telle antipathie pour les discussions, qu’il dit toujours oui; il est vrai que lorsque M. Hennessy demande quelque chose aux ministres, leurs excellences ne disent jamais non.

Hericart de Thury (le Vicomte de.) Gouverneur des Catacombes, ce deputé se croit toujours au milieu des morts, et il ne dit rien, pour ne pas troubler le silence des tombeaux.

Jaquinot-Pampelune. On pourrait dire que M. Jaquinot est né procureur du roi; ennemi de la liberté de la presse, il s’éleva constamment contre l’institution du jury, et soutint que la police ne pouvait jamais avoir tort; il demanda que l’on ajoutât quelque chose à l’horreur de la captivité, en empêchant les prévenus de communiquer avec qui que ce fût. C’est le plus terrible antagoniste des auteurs, éditeurs, imprimeurs et libraires. La vue d’un journal lui fait mal; et si l’on fait de l’esprit dans le département de la Seine, ce n’est pas sa faute.

Jankowitz (le Baron.) C’est un membre distingué de l’opposition. La proposition qu’il fit prouve son désintéressement: il demanda qu’à l’avenir, un membre de la chambre qui accepterait une place du pouvoir, fût obligé de subir les chances d’une nouvelle élection. La proposition fut rejettée, mais il reste à ce député l’honneur de l’avoir faite.

Joffrion (de.) C’est un médecin qui n’a pu encore trouver de remède à la maladie ministérielle dont il est atteint.

Kergariou (le Comte de.) Ancien chambellan de Napoléon, préfet sous Louis XVIII, c’est un ministériel timide; il parle peu et vote comme un homme qui regrette sa place.

Kœchlin. C’est le commerçant le plus riche et l’homme le plus bienfaisant de son département. Une brochure qu’il publia en 1822 le fit condamner à six mois de prison. M. Kœchlin aurait pu se soustraire à la captivité, mais il ne le voulut pas, et se fit écrouer à la prison de Ste. Pélagie. Il est presque inutile de dire que M. Kœchlin siège à gauche. C’est un redoutable adversaire des ministres.

Labretonniere. Très honnête homme, qui ne demande rien aux ministres; mais qui ne veut leur rien donner, pas même sa voix.

Lacaze (le Marquis de.) Si un ministre parle pour une proposition, M. Lacaze dit que c’est très bien; si le lendemain un ministre parle contre, M. Lacaze dit que c’est encore mieux; c’est un homme qui est content, pourvu qu’il admire.

Lafont (le Baron.) C’est un bon général, qui pour les affaires législatives, s’en rapporte entièrement aux ministres.

La Fruglaye (le Comte de.) Les frères Franconi n’ont pas dans leur troupe de meilleur écuyer que ce député; c’est aussi le meilleur sauteur de France.

Lapanouge (César de.) C’est le cousin et le bras droit de M. de Villèle: sa parenté, avec le ministre des finances a singulièrement changé la face des affaires de ce banquier. Ces deux personnages vivent dans la plus grande intimité; ils se quittent peu, et font quelquefois de la littérature ensemble. Voici deux vers qu’ils ont improvisés de compte à demi; M. de Villèle, rendant grâce à ses amis qui l’avaient poussé au ministère, s’écria:

       “Dis-moi, cher Lapanouge,

Qu’eussé-je été sans eux?”

Et M, Lapanouge répondit sans hésiter:

“Le maire de Toulouge.”

Lebeschu de Champsavin. Agé de 70 ans; taille, 5 pieds 6 pouces; cheveux, absents; influence législative, nulle.

Leclerc. Il va comme on le mène, et prend les phrases des ministres pour des paroles de l’évangile.

Ledissez-Panouran. Il n’est pas libéral, il n’est pas ministériel, il n’est pas ultra. Qu’est-il donc? Nous vous le dirons, lecteur, aussitôt que nous aurons pu le découvrir.

Lepaige. C’est un fragment de la majorité compacte qui trouve tout bien par ordre.

Leroux-Duchatel. C’est un excellent homme, royaliste modéré: s’il demande quelque chose aux ministres, ce n’est pas pour lui, mais seulement pour ses concitoyens.

Leroy (le Baron.) Il a beaucoup de talent comme financier, et peu comme législateur.

Letissier. Las de vivre ignoré, il se fit élire député, et n’en est pas plus connu pour cela.

Leviste de montbriant (le Comte.) Des biographes assurent que cet honorable a beaucoup de talent; des gens qui n’ont pas manqué une séance de la chambre n’en savaient rien.

Lagardiere (le Vicomte de.) Il a succède à l’éloquent et courageux Manuel....On s’en apperçoit bien.

Lizot. C’est le juge-de-paix du 10e arrondissement de Paris. Ce n’est pas du dévouement qu’il montre pour les ministres, c’est une espèce de culte qu’il leur rende. Voici la phrase là plus remarquable, du moins ignorée de ses discours:—“Un ministre est l’homme du roi; sous ce rapport, je respecte tous les ministres.” Et les ministres, qui ne sont pas ingrats, comme chacun sait, ont beaucoup de considération pour M. Lizot.

Loyson de Guinaumont. C’est une espèce d’entrepreneur de succès ministeriels et le plus insatiable solliciteur. Les discours de M. Loyson ne ressemblent en rien au chant du cygne.

Longueve (Henri de.) Il fait peu de discours et obtient beaucoup de places. Les ministres, qui ont pourtant besoin d’éloquence, se contentent de son vote, persuadés qu’on ne saurait peigner un diable sans cheveux.

Lyle-Taulane (de.) C’est un de ces honorables clôturiers qui glissent tout doucement sur le fleuve de l’oubli.

(A continuer.)

AGRICULTURE.

Extraits d’un Discours prononcé le 4 Octobre dernier, anniversaire de la Société d’Agriculture du Comté de Hartford (Connecticut,) par F. Hall, Professeur de Chimie et de Minéralogie au Collège de Washington.

Messieurs—Il n’est pas nécessaire de vous dire que l’origine de l’agriculture remonte à l’âge d’or;—que cet art a été connu des anciens Grecs, des Egyptiens et des Caldéens;—qu’il date même d’une époque plus reculée; que c’est le premier qui ait été communiqué par le ciel à l’homme déchu de son premier état. Le chef du genre humain, chassé du paradis de délices, où le travail n’était pas nécessaire, eut ordre de devenir agriculteur, dé “cultiver la terre, d’où il avait été tiré.”

Il est inutile de remarquer que dans tous les temps, l’agriculture pratique a été regardée par les vrais sages, comme une des occupations les plus honorables qui pussent engager l’attention, de l’homme.

Abraham, dont la vie était dévouée â ses troupeaux, qui était, comme l’écriture nous l’apprend, “riche en bestiaux, en argent et en or,” fut très estimé et respecté des nations chez lesquelles il s’éjourna, ainsi que de leurs princes et de leurs souverains. Une fois par mois, les rois de Perse se dépouillaient de leurs habits royaux, et allaient dans les champs converser et manger avec les cultivateurs. Les empereurs modernes de la Chine passent, nous dit-on, un jour de l’année à conduire de leurs mains la charrue.

Un cultivateur pourrait-il être porté à croire que son état est dégradant, lorsqu’il lira l’histoire des Romains; lorsqu’il apprendra avec quel plaisir les plus distingués de leurs généraux, de leurs dictateurs et de leurs souverains, pratiquaient cet art; combien ils avaient hâte de se soustraire aux fatigues et aux scènes sanglantes dé la guerre, afin de pouvoir de se livrer paisiblement à la culture de leurs terres?

Regulus, commandant les légions romaines en Afrique, demanda instamment au sénat d’être rappellé, par la raison que s’il était plus longtemps absent, la culture de sa terre serait négligée. Quelle réponse le sénat lui envoya-t-il? Que tant qu’il commanderait avec succès les armées de la république, sa terre serait cultivée aux frais de l’état.

Pensez-vous, messieurs, que l’agriculture fût peu estimée à Rome, dans le temps que Portius Caton, vaillant guerrier, et ennemi déclaré de tout ce qui ne tendait pas directement à avancer le bien-être de sa patrie, en écrivait un traité? Il en devait être autrement.

L’empereur Diocletien, renommé par ses talens militaires, et par la protection qu’il accordait aux lettres, abondonna volontairement le sceptre du monde pour se livrer à la culture d’une petite terre à Salone. Et quand on le pressa ensuite de reprendre la pourpre impériale, quelle fut sa réponse? “Qu’il prenait plus de plaisir à cultiver son petit champ, qu’il n’en avait éprouvé dans un palais, lorsque sa puissance s’étendait sur toute la terre.”

Peut-on croire que la vie agricole était regardée avec dédain quand Virgile publiait ses Bucholiques et ses Géorgiques immortelles, et quand il disait:

Je chante les moissons: je dirai sous quel signe

Il faut ouvrir la terre et marier la vigne;

Le soins industrieux que l’on doit aux troupeaux:

Et l’abeille économe et ses sages travaux.

Ces poëmes admirables caractérisés par l’élégance, la vivacité, le sel rustique et la fine répartie, peuvent être lus avec profit, même par les cultivateurs de ce siècle éclairé. Ils y trouveront des préceptes judicieux pour reconnaître les qualités des différents sols, pour améliorer ceux qui sont stériles; pour l’éducation du gros bétail, des moutons et des abeilles; pour la culture des grains, des arbres fruitiers et de la vigne, ainsi que pour une infinité d’autres opérations utiles.

Il y a eu sur la terre des contrées où l’agriculture a été pratiquée avec plus de perfection, avant l’ère chrétienne, qu’elle ne l’est présentement en aucun pays du monde. Pour avoir la preuve de ce que j’avance, je vous prie, messieurs, de porter vos regards sur l’ancienne Egypte, ainsi que sur la terre d’Israël, au temps où David, ce roi pasteur, confiait les rênes de l’empire aux mains des hommes les plus sages de son royaume.

Les Juifs, toujours nation agricole, faisaient peu de commerce et avaient peu de manufactures; et cependant quelle immense multitude était nourrie du produit de leur sol? Quand Joab donna le dénombrement du peuple au roi son maître, il se trouva dans le royaume, treize cent mille hommes en état de porter les armes, c’est-à-dire dix fois plus que notre pays n’en a jamais eu à la fois sous les aimes, dans la guerre de l’indépendance. C’étaient les guerriers d’Israël seulement. Quel devait donc être le montant de l’entière population juive? Elle ne pouvait guère être de moins ne dix millions; et cependant la nation ne possédait qu’un territoire très borné, un territoire qui, pris dans ses plus grandes dimensions, n’égalait pas le quart de la Nouvelle Angleterre; et il n’était pas de sa nature plus productif. La terre produisait non seulement assez de grains pour ces dix millions de bouches, mais encore un grand surplus pour l’exportation.—Salomon donnait annuellement au roi de Tyr, en échange pour le cèdre et le pin du Liban, vingt mille mesures de froment et vingt mille mesures d’huile pure.

Qui pourra dire si la Nouvelle Angleterre, l’asile des opprimés, le refuge des pélerins persécutés, ne sera pas, un jour, aussi peuplée et aussi fertile que l’était autrefois la Palestine? Qui pourra dire si nos collines et nos montagnes ne seront pas dans la suite, comme celles de la Judée, couronnées de riches jardins, de vignes fécondes et d’épis dorés? C’est à vous, messieurs, qu’il appartient de résoudre cette question. Si cet heureux évènement se réalise jamais, il sera dû principalement à l’entreprise hardie et judicieuse, à la vigilante industrie des cultivateurs américains.

L’Agriculture est essentielle à l’existence même de la société. Quelques sauvages épars ça et là dans les forêts, peuvent vivre de fruits et de racines, et du produit précaire de la chasse et de la pêche; mais une population médiocrement dense ne saurait subsister sans l’agriculture.

L’agriculture dit Xenophon, est la mère nourricière des arts: là où l’agriculture prospère, ajoute-t-il, les arts fleurissent; mais là où la terre demeure inculte, les arts n’existent point.  Le plus grand obstacle à l’amélioration de l’agriculture est la répugnance qu’ont la plupart des cultivateurs, à faire des expériences. Ils suivent obstinément la routine qui leur a été marquée par leurs ancêtres, et ne peuvent se laisser persuader de s’en écarter le moins du monde.

Pourtant le siècle présent est un siècle d’expériences. Que serait maintenant la chimie, si ce n’était des expériences de Davy, de Gay-Lussac, de Thenard et de Murray? Le détail circonstancié des expériences qui ont été faites dans cette branche, depuis une trentaine d’années, remplirait des centaines de volumes. Par ces expériences, la nature, torturée de mille manières différentes, a été contrainte de révéler à l’homme plus de la moitié de ses mystères.

Imitez le chimiste, messieurs, faites des expériences en agriculture: assurez-vous soigneusement du résultat de chacune, et faites-le connaître au monde. Par ce moyen, il sera mis sous les yeux du public une multitude de faits, qui seront, par la suite, d’une utilité incalculable pour notre pays.

Mais dans vos efforts pour élever l’agriculture, ne tentez-pas d’abaisser les manufactures et le commerce. Ce sont trois alliés d’égal mérite, qui doivent toujours agir de concert. Ils prospèrent ou dépérissent ensemble.

LES BOUCHERIES.

Fêtes rurales du Canada. [De la Minerve.]

  Oui les jeux les plus doux sont les jeux du village,

Et le sage y sourit sans cesser d’être sage.

Homme pur, homme franc, colon du Canada,

Sache à jamais bénir la main qui t’accorda

Le sol qui te nourrit, ces eaux dont tu t’abreuves!

Maître d’un pays libre, et roi du roi des fleuves,

Que peut-il te manquer? quels seraient tes désirs?

Tu sais innocemment varier tes plaisirs:

Ici c’est un repas où la gaîté préside:

Là je vois sautiller la bergère timide:

Plus loin de vieux parens à leurs tendres neveux

Apprennent l’art de vivre et l’art de vivre heureux:

Leurs gestes, leurs discours respirent la franchise;

L’éloquence du cœur plaît, entraîne, électrise;

Et dans ces entretiens se montrent tour à tour

La piété, l’honneur, l’allégresse et l’amour.

  De ces heureux colons comment peindre les fêtes?

Les frimats les plus dûrs, les plus longues tempêtes

En vain de leur gaîté voudraient flétrir les traits.

Ils n’adorent qu’un Dieu, c’est le Dieu des bienfaits:

Ils n’adressent qu’à lui leurs soupirs et leurs larmes;

Pour eux chaque saison produit de nouveaux charmes;

Ranimés au printems, l’été les rajeûnit:

Ils cueillent en automne, et l’hyver les unit.

  Déjà le froid Décembre a blanchi la chaumière;

Du flambeau de la nuit, la jalouse lumière

S’élance sur la neige, attaque ses flocons

Et joint à leur éclat l’éclat de ses rayons.

D’une double blancheur l’élégante parure

Change la nuit en jour, embellit la nature,

Et montre les défauts du rimeur babillard,

Qui dans, ses vers malins, peint l’hyver en vieillard.

  Cependant l’homme heureux, le villageois modeste,

Au coin de son foyer, près d’une table agreste,

Redit à ses enfans: “C’est demain, oui, demain,

Que le pourceau choisi grognera sous ma main:

Oui, Pierrot, oui, Colas; oui, Nanon, oui, Marie,

C’est demain;” à ces mots, la famille ravie,

Pierrot, Colas, Nanon joignent les sauts aux cris;

Et Marie au berceau dort au milieu des ris.

  Du plus léger sommeil on a compté les heures:

L’aurore brille enfin sur ces humbles demeures:

L’enfant au chant du coq joint sa perçante voix,

Et déjà tout s’agite et s’aprête à la-fois.

  Bientôt l’homme des champs amène la victime;

Aux cris de l’animal, on s’empresse, on s’anime:

La mère avec transports rôde de tous côtés,

Polit la table ronde et le vâse argenté;

Tandis qu’en son fauteuil la bonne ayeule assise,

Prête l’oreille au bruit du couteau qui s’aiguise,

Et sourit aux enfans qui célébrant leur jeu,

D’un bucher mal construit alimentent le feu.

Dix jeunes marcassins, au grain assez agile,

S’avançent, sont chassés, reviennent à la file,

Et par les sons aigues de leur gémissemment,

Semblent se lamenter du sort de leur parent.

Soudain le villageois frappe la bête impure;

Le sang, à bouillons noirs, ruisselle de sa hure,

Découle dans le vâse, et suivant les apprêts,

Sous des doigts ménagés forme d’excellents mets,

Qui mêlés avec art rehaussent la gogaille.

La victime s’étend sur le bucher de paille;

Sur son corps l’eau bouillante est versée à grands seaux;

Les plus légères mains font glisser les couteaux

Qui du grognon défunt enlevent la dépouille;

Et bientôt sont formés la succulente andouille,

Le boudin lisse et gras, le soucisson friand,

Et plusieurs mets exquis savourés du gourmand.

Ainsi le bon pourceau change pour notre usage,

Et ses pieds en gelée, et sa tête en fromage

On taille, on coupe, on hache, et des hachis poivrés

Sortent les cervelats, et les gâteaux marbrés.

L’un remplit les boyaux, l’autre enfle les vessies;

On partage, on suspend les entrailles farcies;

Un lard épais et blanc étale ses rayons;

Ici brille la hure, et plus loin les jambons;

Et là se met à part la côtelette plate,

Qu’un sel conservateur rendra plus délicate;

Tous les morceaux enfin, même le plus petit,

Sont rangés avec art et flattent l’appétit.

La famille aussitôt borde la table ronde,

Et du Dieu qui fait tout, bénit la main féconde.

Prodigue sans excès, un nectar généreux

Passe du père au fils et les rend plus joyeux.

Chaque enfant à l’envi dépèce sa grillade:

L’hypocrite matou médite une escalade,

Et d’un œil bien fixé, contemple en miaulant,

Des boudins suspendus l’appareil attrayant.

Tandis que Hanidor, vigilant et fidèle,

Dévore le morceau qu’on devait à son zèle.

  Cependant la famille a préparé ses dons,

Dons sincères, dons purs. Riche, lis ces leçons!

Gaîment on court à table, on en sort avec joie;

On porte au pauvre honnête un morceau de sa proie:

Obliger est tout dire−-ah! si l’homme est content,

C’est alors que son cœur se fond dans un présent.

  Ainsi ces francs colons s’obligent l’un et l’autre;

Tel est le vœu sacré de leur premier apôtre:

“Mes enfans, aimez-vous, et vous serez heureux,

L’union fait la force, et nous rend généreux;

La plus belle vertu, la charité chrétienne,

Est celle que Dieu prêche et qu’il faut qu’on obtienne?”

  De famille en famille on voit les mêmes traits,

La même bonne-humeur et les mêmes bienfaits,

Et dans ce pays libre une vertu commune

De mille humbles maisons paraît n’en former qu’une

Peuple franc, sois béni! qu’un éternel bonheur

Règne dans tes foyers, et surtout dans ton cœur.

Toujours digne du sang qui coule dans tes veines,

Imite tes ayeux, ris au milieu des peines;

Et souviens-toi toujours qu’une douce gaîté

Du corps comme de l’âme assure la conté.

MOIS DE DECEMBRE.

Ce mois était sous la protection de Vesta. Les Romains le désignaient par un esclave qui joue aux dés, et qui tient une torche ardente, allusion aux Saturnales. Les modernes le peignent vêtu de noir, et sans couronne, mais portant le bonnet de la liberté. Il tient le signe du Capricorne, image du soleil qui commence à remonter. Un panier plein de truffes, seule production qu’il fournisse, est à ses pieds; et des enfans qui jouent aux cartes, montrent une ressource contre le vide de ce mois.—Cl. Audran le symbolise de cette manière: Vesta, déesse de la terre, portant d’une main le feu qui lui était consacré, de l’autre, une corne d’abondance, couronnée de tours, est assise sur une chaise, un tambour à ses pieds, sous un temple de forme ronde, au-dessus duquel est une femme tenant un enfant sur ses genoux. On offrait à cette déesse les prémices des enfans et de tous les fruits. L’ours et le lion trainaient le char de Cybèle, que les poëtes ont dit être la même divinité.

LA MUSIQUE.

La musique est l’art de combiner les sons d’une manière agréable. Le chant semble aussi naturel à l’homme que la parole: on le retrouve plus ou moins perfectionné chez tous les peuples, même les plus sauvages. Mais quelques airs échappés à une tête bien organisée ne constituent pas la musique, ou la science des sons: on a chanté bien longtemps avant de réfléchir aux rapports des sons entr’eux, comme on a longtemps parlé avant d’imaginer des grammaires et des rhétoriques. Il y a tout lieu de croire que c’est en Egypte que l’on commença à faire une science de la musique: c’est de cette antique et célèbre contrée que sont sorties la plupart des connaissances humaines. Nous avons plusieurs témoignages positifs des auteurs anciens qui nous assurent que Moyse et Pythagore ont appris la musique chez les Égyptiens Diodore dit que Hermes avait inventé l’harmonie des sons et la lyre à trois cordes. Mais ce peuple sérieux fit faire peu de progrès à un art qui demande de l’exaltation et de grandes réunions: leur musique se réduisait à de petits hymnes, à des chansons nationales, faciles à retenir sans qu’on eût besoin de les noter, et qui se propageaient de père en fils, comme beaucoup de nos airs populaires.

Les Hébreux, qui avaient des fêtes religieuses où tout le peuple se réunissait, donnèrent plus d’extension à la musique, mais peut-être sans rien ajouter à ce qu’elle était. Cependant les livres sacrés louent beaucoup cette musique, dont il nous est difficile de nous faire une idée. Les cérémonies religieuses durent la favoriser, et plusieurs princes, principalement Salomon, entretinrent un grand nombre de musiciens et de musiciennes.

Les Grecs, qui se plaisaient à donner de nobles origines aux arts, qu’ils cultivaient avec tant de succès, prétendaient que les dieux seuls leur avaient appris la musique. Herodote, plus sage que les poëtes, croyait qu’elle avait été apportée par Cadmus dans la Grèce; il est probable qu’elle venait de l’Egypte. Platon, dans un de ses dialogues, dit que c’est Amphion qui l’a inventée. Orphee, Chiron, Demadochus, lui firent probablement faire quelques progrès. Quelques auteurs attribuent à Terpandre, contemporain de Lycurgue, l’invention des premiers modes. Timothee, longtemps après, ajouta une corde à la lyre: ce qui le fit mettre à l’amende par les Lacédémoniens. On prétend que ce fut au hazard que Pythagore dut la découverte des premiers modes de la musique. Un jour, comme if se promenait, il entendit des forgerons qui battaient, à grands coups de marteaux, un fer chaud sur l’enclume, et remarqua que ces coups formaient des accords. Curieux de dé couvrir la cause de cet effet, le philosophe entra dans la forge pour examiner cette différence de sons, ou cette harmonie: il prit les marteaux, et reconnut que la différence des sons venait de leurs poids différents. Il trouva qu’une corde tendue par un poids de douze livres, comparée au ton d’une autre corde tendue par un poids de six livres, était dans le rapport de deux à un, qui est l’octave: celle qui était tendue par un poids de huit livres rendit un son qui était à celui de la première, comme trois à deux; ce qui forme la tierce; et enfin qu’une quatrième corde tirée par un poids de neuf livres, donnait un ton qui, comparé à celui de la première, formait la quarte. Ces connaissances murement digérées donnèrent à Pythagore l’idée d’un instrument pour trouver les proportions et les quantités des sous. Il inventa ensuite une espèce de lyre composée de sept cordes: ces sept cordes lui servirent de modèles pour trouver les sept tons principaux de la voix. Un musicien nommé Simonide ajouta une huitième corde à la lyre de Pythagore, et Olympe découvrit les sémi-tons. En combinant ces sémi-tons avec les tons entiers, ce musicien, qui était un homme de génie, forma un systême qui comprit les trois genres de la musique vocale et instrumentale, savoir: le diatonique, le chromatique, et l’enharmonique.

On inventa ensuite une infinité de caractères, de lettres courbées, couchées, de notes différentes et de figures, dont le nombre était de plus de douze cents. Cette multiplicité de caractères nuisait plus à l’art qu’elle ne le servait: les Romains les réduisirent aux quinze premières lettres de l’alphabet, dont chacune marquait les différents tons; ils en composèrent une table qui fut nommée gamma, d’où vient le nom de gamme. Les Romains, qui reçurent la musique des Grecs, ne lui firent pas faire d’autres progrès que ce changement.

La musique, après avoir été dégradée, et à peu-près perdue, comme tous les autres arts, pendant les temps de barbarie, reçut dans ses caractères une amélioration considérable, par l’invention des sept notes que nous devons à Gui-Aretin. Cette amélioration ne se fit pas sentir dans le moment; mais par la suite, en diminuant les difficultés, elle contribua beaucoup à amener l’art au point de perfection où nous le voyons.

Le plain-chant est un reste de l’ancienne musique, qui, dégradée par des barbares, n’a cependant pas perdu toutes ses premières beautés. En effet, le plain-chant offre encore aux connaisseurs des fragmens précieux de l’ancienne mélodie et de ses divers modes, autant qu’il est possible de les sentir sur des paroles sans rhythme. Ambroise, archevêque de Milan, passe pour en avoir été l’inventeur; c’est-à-dire qu’il faut penser que ce fut lui qui donna, le premier, une forme et des règles au chant ecclésiastique. Le pape Gregoire le grand le perfectionna; mais nous devons les plus beaux morceaux de la musique d’église au roi de France, Robert, qui composa le chant de plusieurs répons et antiennes. Il est une espèce particulière de plain-chant qu’on nomme faux-bourdon: c’est de la musique syllabique non mesurée.—(Petit Dictionnaire des Inventions, &c.)

VERS.

Les vers suivants datent de 1814. Je crois avoir fait mieux, ou moins mal, depuis, quant à la versification; mais aucune de mes pièces, imprimées ou inédites, ne me paraît plus applicable au temps présent, où la décence et la modération semblent être systématiquement bannies de la plupart de nos feuilles périodiques, anglaises ou françaises.

X. Y.

Epitre à C. B. P....r, editeur du Spectateur, sur sa querelle, ou celle de son correspondant, S. S....d, avec M. K.y, rédacteur du Herald.

  P....r, c’est à regret, depuis quelques semaines,

Que je lis les gros mots dont tes feuilles sont pleines;

Sans tant d’emportement ne peux-tu réfuter

Les torts et les travers qu’on cherche à t’imputer?

Je sais que tu te bats contre un rude adversaire,

Que ta guerre avec lui peut-être est nécessaire;

Bats-toi donc, s’il le faut, mais demeure d’accord

Que pour vaincre avec gloire il faut être sans tort.

  “M. K-y, diras-tu, se permettra d’écrire

Tout ce qu’en sa cervelle enfante le délire,

Pourra se faire un jeu de se moquer des gens,

De railler la vertu, d’insulter au bon-sens;

Dans le style empoulé que lui dicte la rage,

Vomira contre tous et le fiel et l’outrage;

Et moi, parlant français, osé-je raisonner,

Si l’on veut bien l’en croire, il faut m’emprisonner!

Dans les transports fougueux où la rage le jette,

Il lui sera permis de faire le prophète,

Et l’on m’interdira de parler du passé!

Le mensonge sera dans sa feuille entassé;

Tantôt, il verra tout avec un microscope,

Puis, tournant le feuillet, il deviendra myope,

Confondra pêle-mêle et vices et vertus,

Encensera Néron, injurîra Brutus!....

Témoin de tant d’horreurs, vous conviendrez, je pense,

Qu’il faut être muet pour garder le silence:

Et comme a dit quelqu’un, ne peut-on à propos

Confondre les pervers et se moquer des sots?”

  Oui, sans doute, on le peut, souvent on le doit même;

Mais en quoique ce soit, il ne faut être extrême:

L’homme sensé toujours tient un juste milieu,

Donne à tout son vrai nom, met tout en son vrai lieu:

Si faire bien pour mal lui semble une loi dure,

Du moins il ne rend pas injure pour injure:

Non par timidité, mais par affection,

Il recherche avant tout la modération;

La modération, vertu de tout vrai sage,

Se remarqué en ses goûts, ses gestes, son langage.

Un soir, à l’Odéon, un poëte français[1]

Met par hazard son pied sur celui d’un laquais:

Ce dernier, courroucé, lève la main, le frappe;

L’autre, homme modéré, sans lui rendre la tape,

Lui dit: “Vous avez tort, je ne vous voyais pas:”

Et l’affaire finit sans un plus grand fracas.

Que fût-il arrivé, si prompt à la colère,

Il eût d’un fort soufflet payé le téméraire?

Que ce dernier criant, peut-être, et de nouveau

Frappant, on les eût crus, mis au même niveau,

Honnis, hués, sifflés, chassés, mis à la porte.

Ton cas, tu m’en peux croire, est de la même sorte:

Tu me dis ton rival grossier, impertinent;

Crains qu’on ne te regarde et mette au même rang.

Si cet auteur veut bien se rendre méprisable,

Faut-il absolument que tu lui sois semblable?

Ou crois-tu que chez lui, sifflant un mauvais goût,

Chez toi, par fantaisie, on applaudira tout?

Garde-toi de compter sur un pareil caprice:

J’aime dans un ami sa vertu, hais son vice;

Pour moi, sans m’égarer dans un sentier tortu,

Partout le crime est crime, et la vertu, vertu.

Le parti qu’on soutient ne fait rien à la chose;

C’est même injurier une honorable cause,

Que la défendre ainsi que ferait ton auteur,

D’un ton exagéré, plein de fiel et d’aigreur.

Ne crois pas qu’un gros mot échappé de ta bouche

Me semble plus poli, me paraisse moins louche,

Que si mon ennemi l’eût le premier émis:

Tout écrivain grossier s’est pour moi compromis;

Je déteste partout le style de Garasse........

“Vous voulez qu’aisément mon rival me terrasse,

Et que sans regimber je tombe sous ses coups?”

  Nullement, mais je veux modérer ton courroux:

Lorsqu’à mauvais dessein quelqu’un sur toi s’avance,

Contente-toi toujours d’une juste défense:

Toujours de ton rival, pour plaire aux bous esprits,

Epargne la personne, en blâmant ses écrits.

Eh! que me fait à moi sa figure grotesque,

Qu’il ait le ton, la mine, ou le maintien burlesque,

Qu’il se dise Gallois, Ecossais, Canadien,

Qu’en sa religion, il soit juif ou chrétien,

Qu’il suive les leçons de Genève ou de Rome?

Ce n’est pas sur ce point que je juge d’un homme,

D’un écrivain surtout, en pays tolérant.[2]

Voici sur ton auteur quel est mon jugement:

Quand, voyant de sang froid quatre-vingt-dix-neuf crimes,

Il dit qu’un Breton mort demande cent victimes;[3]

Lorsque, calomniant et son peuple et son roi,

Il les peint sans pitié, sans honneur et sans foi;[4]

Ou lorsque conseillant et l’horreur et l’outrage,

Ou plutôt, respirant le meurtre et le carnage,

Il trouve impertinent qu’aux Hurons, Iroquois,

Dans leur guerre pour nous l’on impose des lois,

Je m’indigne à propos. Mais, quoiqu’on puisse dire,

S’il fait frémir par fois, plus souvent il fait rire:

Dans un tissu grossier de contradictions,

Le vrai même chez lui prend l’air des fictions.

Quand il donne au vaincu douze fois plus de gloire

Que n’en a le vainqueur, au jour de la victoire;[5]

S’il prédit le passé, raconte l’avenir,

D’un ton gravement sot, je n’y puis plus tenir.

  Pourtant dans ce qu’il dit, soit en vers, soit en prose,

En réprouvant beaucoup, j’applaudis quelque chose:

Dit-il qu’il faut ici plus d’argent, de soldats,

Je suis de son avis, l’approuve, et ne ris pas.

Soutient-il, défend-il notre brave milice;

Que ce soit franchement, par humeur, par caprice,

Qu’importe à moi lecteur? l’écrivain soit béni!

Quoiqu’il en soit, enfin, je me tais, j’ai fini.


M. de la Mothe, L’Odéon est pris ici pour un théâtre quelconque.

L’auteur est bien éloigné d’approuver le manque de patriotisme, ou de louerB l’indifférence en fait de religion; mais il ne peut s’empêcher de trouver ridicule et injuste de reprocher publiquement à un homme, comme on l’a fait à l’époque dont il s’agit ici, et depuis, et le lieu de sa naissance et la croyance qu’il a héritée de ses pères; surtout dans un pays dont la population se compose de tant de nations et de sectes différentes.

A l’occasion d’un nombre de prisonniers américains destinés d’abord par Sir George Prévost, â être fusillés, comme natifs d’Irlande, et conséquemment traîtres envers la Grande-Bretagne, et d’un égal nombra de prisonniers anglais destinés par le président des Etats-Unis, à être fusillés par représailles, si les premiers l’étaient.

Indirectement et virtuellement, s’entend, et non, sans doute, directement et intentionnellement.

l’occasion du combat naval sur le lac Erié.

COLONIES MILITAIRES RUSSES.

L’auteur du Résumé de l’Histoire de Russie faix précéder des réflexions suivantes le morceau ci-dessous sur les Colonies militaires de l’empire russe. Nous avons cru que ce document et ces réflexions ne seraient pas lus sans intérêt, dans un temps où la Russie parait être à la veille de jouer un rôle important sur le théâtre politique et militaire de l’Europe.


En attendant que la fortune et la politique s’expliquent, la Russie réalise, avec un succès égal à son habileté, un plan d’organisation militaire dans ses états, qui n’a encore eu rien d’égal dans le monde, et dont l’accomplissement doit lui soumettre le monde, à moins que les autres puissances, par une nouvelle application du droit d’intervenir, ne lui demandent ce qu’elle veut faire de ses colonies militaires et des trois millions de soldats qu’elles lui donneront dans quinze du vingt ans. On ne peut sans frémir envisager ce prochain redoublement de force et de puissance, appuyé sur de si vastes bases, et preparé avec toutes les combinaisons de la puissance qui prétend à œuvre qui dure. Ainsi, tandis que notre civilisation des régions tempérées, s’avance à grands pas, et que le sol entier de l’Europe riche et éclairée est transformé, embelli par les prodiges, de l’industrie et de la science, on est réduit à se dire: Mais pour qui tant d’opulence est-elle amassée? pour qui tant de grandes choses seront-elles accomplies? et telle est alors la tristesse amère des réflexions qui se présentent en foule, que l’on se sent heureux d’avoir vécu dans nos temps d’orages et de dissentions civiles, parce que l’on aura du moins achevé de vivre, parce que l’on ne sera plus qu’une tranquille poussière, lorsque viendront les jours de catastrophe et de deuil qui doivent probablement livrer à la voracité des peuplades du nord le brillant patrimoine des habitant du midi.


L’empereur Alexandre, a conçu le pensée de fonder, dans les diverses parties de son empire, des colonies, ou plutôt des castes militaires. Là, tous les enfans mâles naîtront soldats; ils passeront sous les drapeaux dès l’âge de quinze ans; ils y resteront enrôlés jusqu’à l’âge de soixante ans. En devenant soldats, ils cesseront d’être esclaves, suivant le loi moscovite. Par là, l’état militaire qui, chez d’autres peuples, est regardé comme un état de servitude, deviendra pour eux le double bienfait de l’affranchissement et de la gloire.

Le monarque prend sur les domaines de la couronne les terres nécessaires à l’établissement des régimens colonisés. En récompense des terres ainsi concédées, ces guerriers doivent se nourrir et s’entretenir eux-mêmes, ainsi que leurs chevaux, tant qu’ils ne seront pas commandés pour des expéditions qui leur, fassent quitter leur pays. Par ce moyen, des armées entières, des armées innombrables, seront tenues sur pied, durant la paix, sans entraîner le trésor public dans aucune dépense.

La solde de ces corps commencera quand ils seront appellés hors de leurs colonies respectives; cette solde aura toute la modicité dont peut se contenter un peuple neuf, sans besoins et sans luxe.

Ces populations militaires, où tous sans exception porteront les armes, s’exerceront sans cesse: elles conserveront leur esprit guerrier, comme les stations de l’empire romain, au temps le plus redoutable de ses conquêtes.

Quand ce projet aura reçu son exécution, l’empire comptera trois millions de mâles dans les colonies militaires. C’est donc parmi ces trois millions que l’autocrate de toutes les Russies pourra faire marcher, par un simple ukase, tous les individus, depuis quinze ans jusqu’à soixante, c’est à dire au moins quinze cent mille combattans.

Dès à présent, quarante mille cavaliers sont ainsi colonisés; une seule colonie, établie non loin de Petersbourg, près de Novgorod, compte soixante mille combattans. Le total de la caste militaire déjà constituée est de quatre cent mille soldats.

CORRESPONDANCE.

Mr. Bibaud.—Mon savant ami J. B. M., m’ayant écrit qu’il avait publié ses réflexions sur un écrit intitulé Géologie et signé J. B. M. parce que “les Canadiens prennent enfin la manie de communiquer leurs idées publiquement, surtout quand noire jeunesse peut en recevoir quelque bien, quand ce ne serait que de faire naître en elle le désir de se rendre capable d’en faire autant, ce qui fait sortir les talens, &c., ce sont ses propres expressions; pour la même raison, Monsieur, vous voudrez bien publier dans votre intéressante Bibliothèque Canadienne, quelques courtes observations sur l’écrit de Mr. J. B. M.”

D’abord, je commence par rendre hommage aux talens de mon savant ami, à ses profondes connaissances en chimie, mais surtout à sa piété et à sa religion, qui lui font tenter le moyen d’accorder le texte sacré de Moyse avec les opérations naturalles qui ont dû avoir lieu aux premiers jours de là création. En tout cela, sans doute, il ne fait que donner de nouvelles forces à mon écrit, et je lui en ai obligation. Si son système de la formation des houilles on charbon de terre, en vingt-quatre heures est approuvé des géologues et des physiciens, alors il ne répugnera pas à l’exactitude des théologiens de l’admettre. En passant, j’observerai à Mr. J. B. M., que je n’ai pas prétendu exclusivement que le charbon de terre fût de création primitive, mais qu’on devait se restreindre, pour en prouver la formation, à des systèmes qui ne dévanceraient pas l’époque de la création fixée par les livres sacrés.

Mon savant ami prend l’alarme à ces mots; “Demander pourquoi et comment, quand il s’agit des œuvres de Dieu, c’est une impiété.” Cependant sa pensée est exactement la mienne; je ne parle ici, comme lui-même, que des abus de ces philosophes qui n’étudient la nature que pour contredire l’œuvre de Dieu. Je dis, au contraire, dans mon écrit, que l’étude de la nature est digne de l’homme. Je prie mon savant ami de le relire. Pour porter une critique sur une phrase, il faut avoir présent à la mémoire le contexte, ce qui précède et ce qui suit.

Mr. J. B. M. dit qu’une science naturelle ne naît pas de la confusion et du désordre, mais bien de l’ordre et de la régularité. Ne lui en déplaise, je regarde cette sentence comme un vrai sophisme; la science ne naît pas toujours de l’ordre et de la régularité; l’étude de la chronologie, par exemple, ne s’étend-elle pas sur des dates incertaines qu’on cherche à éclaircir et fixer. Au surplus, je n’ai pas dit que la terre fût bouleversée de fond en comble jusque dans ses entrailles; mais il y a assez de confusion sur sa surface pour exercer les talens des naturalistes; mon savant ami n’en disconviendra pas.

Quant à la force centripète, Mr. J. B. M. paraît parler de cette force par laquelle les corps sublunaires tendent au centre de la terre; je l’admets avec lui sans réplique, au moment de la création de la terre; mais je parlais dans mon écrit de cette grande forcé par laquelle la terre est attirée vers le soleil; la terre ne pouvait pas y tendre avant qu’il fût créé.

Mon savant ami croit que je veux établir des systêmes; je peux lui persuader que je suis trop ennemi des systêmes pour cela; mon écrit le prouve assez: mon unique intention était de contredire les systêmes qui s’éloignent des jours naturels de la création. Je suis loin de vouloir détourner la jeunesse de l’étude d’aucune science, comme paraît le craindre Mr. J. B. M.: ce ne sont pas là mes principes; je n’ai cherché qu’à mettre en garde les jeunes étudians contre les écris de ces prétendus philosophes qui, s’écartant de la droite route, tombent dans des erreurs qui répugnent autant à la saine philosophie qu’à la religion.

Pour me reconcilier avec Mr. J. B. M., en finissant, je dirai comme lui, en supposant les mêmes circonstances qu’il exige, “que je n’aurais aucun scrupule d’exercer un peu mes faibles talens dans la poursuite de cette étude (l’histoire naturelle), qui malheureusement ne compte encore que bien peu d’amateurs dans notre pays.” L’étude des œuvres du Créateur porte naturellement l’homme de bien à le glorifier. Cœli enarrant gloriam Dei, et opera manuum ejus annunciat firmamentum.

Je suis avec considération et estime, Monsieur,

Votre très humble et très obéissant Serviteur,

J. B. M.

St. Paul de la Valtrie, 29 Décembre, 1827.



MERVEILLES DE LA NATURE ET DE L’ART.

SALINES D’ALIMENA.

Aussi féconde que variée dans ses produits, la nature offie sans cesse de nouveaux plaisirs à gouter, de nouvelles connaissances à acquérir à l’observateur qui veut l’étudier. Sous ce rapport, les Salines d’Alimena sont dignes de toute son attention. Qu’on se figure une énorme montagne tonte de sel, et qu’on exploite comme une carrière de pierres; qu’on y emploie même souvent le feu de la mine pour en tirer des masses considérables; qu’il s’en trouve des quartiers posés naturellement par lits les uns sur les autres, et séparés par des couches d’une glaise fine et détrempée, qui renferme aussi beaucoup de parties salines; que ce sel soit, par sa nature, blanc comme du marbre de Parcs; et qu’il y en ait des morceaux qui ont la transparence d’un cristal brut, et d’autres une teinte violâtre comme la prime d’améthyste; alors on aura une juste idée d’un phénomène assez commun en Sicile, mais plus particulier encore à Alimena.

LE PUITS DE BOÏAVAL.

Au village de Boïaval, dans le département du Pas de-Calais, on voit un puits extraordinaire. Sa profondeur est environ de cent pieds. Quelquefois il se passe jusqu’à trois semaines sans qu’il s’y trouve une goute d’eau; mais, tout à coup, il se dégorge avec tant d’abondance, qu’il forme un ruisseau considérable. En 1736, l’eau s’y éleva au point de pénétrer dans toutes les caves des maisons qui l’avoisinent. On a remarqué que ces crues d’eau n’ont lieu que lorsque c’est le vent du nord qui souffle.

LES JOKULS, EN ISLANDE.

Les montagnes appellées, en langue islandaise, Jokuls, et dont le sommet est continuellement couvert de neige et de glace, offrent une singularité bien remarquable. Leur forme n’est jamais deux jours de suite la même. Elles croissent, décroissent, s’élèvent et s’abaissent tour-à-tour. Les parcourt-on, on est tout étonné de trouver un pays plat, là où un gouffre existait la veille ou un précipice à la place d’une colline qui barrait le chemin. C’est un amoncellement et un changement perpétuels, qui proviennent du mêlange de glaces et de volcans dont l’Islande est en partie composée, et qui donne lieu à toutes les catastrophes auxquelles elle est si sujette.

RUINES DE BALBEC OU HELIOPOLIS.

Mais ce qu’on ne saurait trop admirer, et ce qui donne la preuve incontestable du haut degré de perfection auquel l’art de l’architecture était porté, à l’époque où ces édifices ont été construits, c’est la coupe et l’énormité des pierres qui les composaient. Quoiqu’elles ne soient jointes par aucun ciment, il serait impossible de faire entrer la plus mince lame d’un couteau dans leurs interstices. La plupart, résistant aux injures de l’air et aux outrages du temps, ont conservé leur couleur blanche primitive. Quant à leur énormité, elle est, en quelque sorte, incompréhensible. A l’ouest, la seconde assise est formée de pierres qui ont depuis huit jusqu’à trente-cinq pieds de longueur, par environ neuf de hauteur, et, par-dessus cette assise, a l’angle du nord-ouest, il y a trois pierres qui occupent, à elles seuls, un espace de cent soixante-quinze pieds et demi, sur une épaisseur commune de douze. Les pierres, qui ont été tirées d’une carrière qui règne sous la ville, et dans la montagne adjacente, sont d’un granit blanc, à grandes facettes luisantes comme le gypse. Il en est resté une taillée sur trois faces, qui a soixante-neuf pieds trois pouces de long, sur douze pieds dix pouces de large, et treize pieds trois pouces d’épaisseur. Comment s’y prenait-on pour manier et transporter des masses si énormes? C’est ce qu’on se demande, sans pouvoir même supposer les moyens qui étaient employés pour y parvenir. Les habitans de Balbec, qui veulent, contre toute vraisemblance, que cet édifice ait été bâti par Salomon, supposent que ce prince avait les Déynoûn, ou génies, à ses ordres, et que c’est par eux que tous ces travaux, qui paraissent aujourd’hui tenir du miracle, ont été exécutés.

VILLE BATIE PAR LES GAULOIS.

En Champagne, près d’une montagne appellée le Catelet, située à très peu de distance de la Marne, et dominant sur un lieu nommé Gourson, existait, du temps des Gaulois, une ville assez considérable, que quelque révolution de la nature avait engloutie, depuis un nombre de siècles qu’on ne saurait exactement définir. Le gouvernement français ayant été positivement instruit, et 1772, de cette particularité, qui jusque-là n’avait paru qu’une tradition populaire, ordonna des fouilles, qui furent faites dans une étendue de cinq mille toises carrées. Le succès couronna cette noble entreprise; car à peine la terre fut elle creusée à une certaine profondeur, qu’on découvrit onze rues bien alignées, bien bâties, et qui avaient quinze ou vingt pieds de largeur; plusieurs places, huit temples et des bains publics, que soutenaient cent quarante-quatre pilliers. La plus grande partie de ces monumens était en ruine; mais on trouva cependant des meubles, ainsi que des ustensiles de toute espèce, à l’usage des Gaulois et des Romains, dans quatre-vingt-dix maisons; et dans les autres débris de la ville, des marbres précieux, d’anciennes mosaïques, des statues, des divinités payennes, et une grande quantité de médailles d’argent et de bronze, représentant les empereurs romains, depuis Cesar jusqu’à Constantin.

Il est à remarquer qu’on ne trouva aucun monument chrétien parmi toutes ces ruines. Les savans qui ont voulu connaître le nom de la ville dont nous venons de parler, et l’époque où elle a été bâtie et abîmée, se sont perdus dans leurs recherches.

LE PONT DU DIABLE.

C’est le nom qu’on a donné au dernier des cinq ponts que l’on trouve sur la route qui part d’Altdorff, et qui serpente le long du Schellenthal, en Suisse. Sa hardiesse et sa grande élévation au-dessus du précipice, ont sans doute contribué à cette dénomination singulière, à laquelle les habitans du pays ajoutent une espèce de foi. La forme et la dimension de ce pont sont étonnantes. Qu’on se figure une voute en plein ceintre, de trente pas d’ouverture, n’ayant aucune épaisseur, et qui, fondée sur deux saillies de roches, semble soutenue en l’air comme par magie. Au-dessous, est un précipice dans lesquel roule à grand bruit un torrent furieux. Mais ce qui surprend encore davantage, c’est la difficulté de concevoir comment on a pu s’y prendre pour établir l’échafaudage et le ceintre nécessaires à sa construction, d’autant plus que ce ceintre ne présente qu’une maçonnerie de pierres brutes, dont le grain paraît peu propre à s’allier avec le ciment. Lorsque du haut de cette arche admirable, on contemple la cascade que forme la Reuss, et que l’on sent retomber sur soi, en forme de pluie, la bruine épaisse qu’elle lance à une hauteur extraordinaire, on se croit transporté dans un monde idéal, et tout ce qu’on a entendu dire, pendant son enfance, des génies et des fées, paraît vraisemblable. Le route qui conduit à ce pont prouve le courage et la constance que les Suisses ont dû déployer pour vaincre des difficultés qui semblent insurmontables. Ici, le chemin suspendu sur les plus horribles précipices, et ne se détournant pour aucun obstacle, est soutenu en saillies sèches, sitôt que les roches, presque perpendiculaires, n’ont pu lui assurer un double appui: là, il franchit l’abîme à la faveur des ponts les plus hardis et les plus légers. Plus loin, il traverse un roc de granit de quatre-vingts pas d’épaisseur. En un mot, c’est une longue suite de merveilles, que toutes les couleurs de la peinture et les images de la poésie ne sauraient représenter.

VARIETÉS.

Paris, 20 Septembre.

Le colonel Gustavson (Gustave IV. ex-roi de Suède) est encore à Leipzic, où il étudie assidûment la langue turbue, dans l’intention d’aller habiter la Turquie. Ce sera le second monarque suédois auquel la Porte aura donné un asile. Voltaire a immortalisé le séjour de Charles XII à Bender.

M. Beaulieu, homme de lettres, doyen des journalistes de France, vient de mourir à Marly, près Paris.

On croit avoir fait une découverte utile, dont le résultat est de porter un secours efficace aux personnes affectées de pthisie.—On assure que le gaz chlore est un puissant moyen de rétablir la circulation de l’air dans les poumons et de cicatriser ces plaies plus ou moins larges qui désolent l’être qui en est affecté, et détruisent la vie. Plusieurs faits surprenants se sont présentés dans différents travaux sur ce gaz, et on en a vu des effets merveilleux.

Paris, 4 Novembre. L’Académie française tiendra une séance publique le mardi, 18 Novembre, à deux heures, pour la réception de M. Royer-Collard, député.

Nos lecteurs peuvent se souvenir que l’Académie des sciences à l’époque de la mort de M. Laplace, déclara qu’il y avait lieu à ajourner à six mois la nomination d’un nouveau membre en remplacement de cet illustre géomètre. Ce terme expiré, la section de géométrie avait à donner de nouveau son avis. M. Legendre a déclaré en son nom, dans la séance du 29 Octobre, qu’il n’y avait encore lieu à aucune nomination dans son sein.—L’académie à adopté l’avis de la section, et ajourné encore une fois à six mois la nomination en remplacement de M. Laplace.

La croix de chevalier vient d’être accordée à M. M. Scribe et Mazeres, auteurs dramatiques.

On écrit de Rome, sous la date du 20 Octobre, que d’après les ordres du Pape, on va ouvrir, dans le mois de Novembre, des fouilles destinées à la découverte de plusieurs antiquités. Elles commenceront par la place située entre le Colysée et le temple de Vénus à Rome, et se continueront sans interruption dans les quartiers contigus à ces deux édifices.

Dans la dernière séance de la Société géographique de Paris, M. Pacho a lu un discours sur un projet de M. Drovetti, consul-général de France en Egypte, concernant la civilisation de l’intérieur de l’Afrique.

Ce projet consisterait à envoyer d’Egypte, un certain nombre de jeunes noirs africains qui seraient admis dans nos écoles, et pourraient être initiés aux avantages de la civilisation. M. Drovetti annonce qu’il fera les premiers frais de cette entreprise philanthropique, dont les sciences non moins que l’humanité pourront recueillir des fruits utiles.

“Ces jeunes Africains, a dit M. Pacho, retournant ensuite dans leur patrie, y propageraient leurs nouvelles idées. Ces idées, pareilles à la flèche messagère, passeraient de tribu en tribu, d’oasis en oasis; les esprits réfléchiraient, les lumières se répandraient, et quelques enfans occasionneraient peut-être ce que tant de siècles n’ont pu produire.

“On lit dans le journal anglais le Southampton-Herald:

“Un service de voitures à vapeur va être établi entre Southampton et Londres. A chaque relai, au lieu de changer de chevaux, comme les voitures faisaient jadis, la nouvelle voiture prendra du charbon et de l’eau. C’est le capitaine Ewarth qui est à la tête de cette entreprise.”

Canal de Welland.—A un dîner de la Sainte-Catherine, le 30 Novembre dernier, en faisant les remercimens à la santé qui lui fut portée, M. Merrit dit, qu’on ne pouvait raisonnablement douter, qu’à semblable époque l’année prochaine, le canal ne pût offrir une navigation non interrompue, à des vaisseaux de 125 tonneaux, entre les lacs Erie et Ontario. Ce canal s’ouvre aux dépens d’une compagnie privée, dans laquelle les gouvernemens provinciaux du Haut et du Bas Canada ont pris des actions à un montant considérable.

Le canal de Rideau qui doit former une communication de l’Ottawa au lac Ontario, s’ouvre aux frais du gouvernaient de la mère-patrie, dans des vues d’utilité militaire. Il ne peut être parachevé de plusieurs années.

De Montréal on peut communiquer avec des bateaux avec l’embouchure du Rideau par les canaux de Lachine et de Grenville. Les bateaux à vapeur naviguent entre le canal de Lachine et Grenville et d’audessus de Grenville jusqu’à Rideau.

Le canal de Welland une fois achevé, les vaisseaux de 125 tonneaux pourront venir des lacs Hurons, Sainte Claire, Erie et Ontario à Prescot, à cent milles de Montréal; et il n’y a que quatre rapides à améliorer, et sur lesquels passent déjà des bateaux et des cages, pour amener les vaisseaux de 125 tonneaux du Saut Sainte-Marie, le canal du lac Supérieur, à Québec.

Il existe déjà par une branche du canal de l’Erie, une communication par eau non-interrompue entre New York et le lac Ontario. Lorsque le canal de Welland sera fini, il y aura aussi une communication suivie entre la Nouvelle Orléans et le lac Erie et le lac Ontario: ce qui fait entre l’Atlantique à New York, le golfe du Méxique et le golfe Saint-Laurent, par les grands lacs.

En peu d’années, avec l’arrangement convenable, les bateaux à vapeur doivent communiquer par les grands lacs entre New-York, la Nouvelle Orléans et Québec, et échanger par là les produits naturels et manufacturiels d’une étendue de territoire de 1500 milles, du nord au sud, et de la motié de cette étendue, de l’est à l’ouest, habitée par environ dix millions d’âmes.

L’ABENAQUIS,

OU LA TENDRESSE PATERNELLE.

Pendant les dernières guerres de l’Amérique, une troupe de sauvages Abénaquis défit un détachement Anglais; les vaincus ne purent échapper à des ennemis plus légers qu’eux à la course, et acharnés à les poursuivre. Ils furent traités avec une barbarie dont il y a peu d’exemples même dans ces contrées.

Un jeune officier anglais, pressé par deux sauvages, qui l’abordaient la hache levée, n’espérait plus se dérober à la mort. Il songeait seulement à vendre chèrement sa vie. Dans le même temps, un vieux sauvage armé d’un arc s’approche de lui, et se dispose à le percer d’une flèche: mais après l’avoir ajusté, tout d’un coup, il abaisse son arc, et court se jetter entre le jeune officier et les deux barbares qui allaient le massacrer: ceux-ci se retirèrent avec respect. Le vieillard prit l’Anglais par la main, le rassura par ses caresses, et le conduisit à sa cabane, où il le traita toujours avec une douceur qui ne se démentit jamais. Il en fit moins son esclave que son compagnon. Il apprit la langue des Abénaquis, et les arts grossiers en usage chez ces peuples. Ils vivaient fort contents l’un de l’autre. Une seule chose donnait de l’inquiétude au jeune Anglais; quelquefois le vieillard fixait les yeux sur lui, et après l’avoir regardé, il laissait tomber des larmes.

Cependant au retour du printemps, les sauvages reprirent les armes, et se mirent en campagne: le vieillard qui était encore assez robuste pour supporter les fatigues de la guerre, partit avec eux, accompagné de son prisonnier—Les Abénaquis firent une marche de plus de deux cents lieues à travers les forêts; enfin ils arrivèrent à une plaine, où ils découvrirent un camp d’Anglais. Le vieux sauvage le fit voir au jeune homme, en observant sa contenance.... Voilà tes frères, lui dit il, les voilà qui nous attendent pour combattre. Ecoute, je t’ai sauvé la vie; je t’ai appris à faire un canot, un arc, des flèches, à surprendre l’orignal dans la forêt, à manier la hache, et à enlever la chevelure à l’ennemi. Qu’étais-tu, lorsque je t’ai conduit dans ma cabane? Tes mains étaient celles d’un enfant; elles ne servaient ni à te nourrir, ni à te défendre; ton âme était dans la nuit; tu ne savais rien; tu me dos tout. Serais-tu assez ingrat pour te réunir à tes frères, et pour lever la hache contre nous?—L’Anglais protesta qu’il aimerait mieux perdre mille fois la vie que de verser le sang d’un Abéçuis.

Le sauvage mit ses deux mains sur son visage, en baissant la tête; et après avoir été quelque temps dans cette attitude, il regarda le jeune Anglais, et lui dit d’un ton mêlé de tendresse et de douleur: as-tu un père....Il vivait encore, dit le jeune homme, lorsque j’ai quitté ma patrie. Oh! qu’il est malheureux, s’ecria le sauvage! et après un moment de silence, il ajouta: Sais tu que j’ai été père?—Je ne le suis plus—J’ai vu mon fils tomber dans le combat; il était à mon coté; je l’ai vu mourir en homme; il était couvert de blessures, mon fils, quand il est tombé. Mais, je l’ai vengé—oui je l’ai vengé—Il prononça ces mots avec force; tout son corps tremblait; il était presqu’êtouffé par des gémissemens qu’il ne voulait pas laisser échapper. Ses yeux étaient égarés, ses larmes ne coulaient pas. Il se calma peu-à-peu, et se tournant vers l’orient, où le soleil allait se lever, il dit au jeune Anglais: Vois-tu ce beau ciel resplendissant de lumière? As-tu du plaisir à le regarder? Oui, dit l’Anglais: j’ai du plaisir à regarder ce beau ciel. Eh bien!—Je n’en ai plus, dit le sauvage, en versant un torrent de larmes. Un moment après, il montra au jeune homme un manglier qui était en fleurs. Vois-tu ce bel arbre, lui dit-il? As-tu du plaisir à le regarder?−-Oui, j’ai du plaisir à le regarder.—Je n’en ai plus, reprit le sauvage avec précipitation; et il ajouta tout de suite: Pars, va dans ton pays, afin que ton père ait encore du plaisir à voir le soleil qui se lève, et les fleurs du printemps.

DIALOGUE.

Voyons donc, mon cher enfant; vous avez l’air triste; qu’avez vous? contez-moi votre peine.

Moi! monsieur; je n’ai rien.

Allons, parlez-moi sans feinte: mon âge et mon amitié pour vous doivent vous inspirer quelque confiance.

Eh bien, monsieur, j’aime....et j’aime éperduement.

N’est-ce que cela? eh mais, on voit de ces choses-la tous les jours.

Oh? moi, je suis privilégié dans mon malheur: j’aime une femme de trente ans....

Une femme de trente ans? eh mais, à trente ans une femme est encore aimable; on aime, tous les jours, des femmes de trente ans.

Oh! moi, je suis plus malheureux qu’un autre; celle que j’aime ne m’aime pas.

Eh mais! il n’y a rien là d’extraordinaire; on aime, tous les jours, sans être aimé: est-ce qu’un autre a su lui plaire?

Non: elle me trouve fort à son gré; mais elle ne veut aimer personne.

Eh mais! cela n’est pas rare; on voit, tous les jours, des gens qui n’aiment qu’eux mêmes.

Eh! morbleu! ce n’est pas le défaut de mon adorable: elle est d’une modestie charmante; mais elle se défie des hommes, surtout quand ils sont français....

Eh mais! elle a raison: il faut se défier d’un Français, dès qu’il parle d’amour.

Mais enfin, monsieur, je l’adore de toute mon âme; et quoique français, je n’aime et ne veux aimer qu’elle.

Eh mais! qu’y a-t-il donc là de si surprenant? On voit, tous les jours, des Français aimer sincèrement et constamment.

Elle prétend que non, elle; et tout ce que je puis dire pour la persuader, la fait rire....

Eh mais! mon ami, cela est très naturel: tous les jours, une femme tourne en plaisanterie un aveu sincère.

Mais quel parti prendre?—Patienter.

Son incrédulité me désole.—Elle finira pas croire.

J’en doute; elle s’obstine à regarder tous les hommes comme des fourbes.

Eh mais! tous les jours, il y a des hommes fourbes qui dupent les femmes sensibles.

Oui, mais enfin, tes méchants perdent les bons, et toutes les fourberies du monde n’empêchent pas qu’il n’y ait des hommes droits et sincères.

Consolez-vous, mon cher; tous les jours, on se console de n’être pas aimé d’une femme.

Oh! d’une femme qu’on adore? non; sa froideur est un supplice affreux pour un cœur vraiment pénétré.

Consolez vous, vous dis-je: elle vous aimera à son tour.

Elle! non jamais: elle met son bonheur dans son indifférence.

Consolez-vous, vous dis-je encore une fois; tous les jours, une femme vent d’une façon et agit de l’autre; rien de plus ordinaire que de la trouver sensible du jour au lendemain.

ANECDOTES.

Louis XIV avait fait donner à Jean-Bart une rescription de mille écus sur le trésor royal. C’était un nommé Pierre Gruin qui devait la payer: il demeurait dans la rue du Grand Chantier au Marais. Jean-Bart se rend à Paris, va dans la rue du Grand Chantier, demande de porte en porte où demeure Pierre Gruin, trouve sa maison et dit au portier: N’est ce pas ici que demeure Pierre Gruin? Le portier lui répond: C’est ici que demeure M. Gruin. Jean-Bart entre, monte l’escalier, ouvre les portes, arrive au lieu où M. Gruin est à diner avec plusieurs de ses amis, et dit: Lequel de vous est Pierre Gruin? Pierre Gruin lui répond: C’est moi qu’on appelle M. Gruin. Jean-Bart lui présenté sa rescription: M. Gruin la prend, la lit, passe sa main par-dessus son épaule, comme pour la lui rendre, la laisse tomber, et dit: Vous repasserez dans deux jours. Jean-Bart tirant son sabre, qu’il portait toujours au lieu d’épée; Remasse cela, dit-il, et paie tout à l’heure. Un de ceux qui dînent avec M. Gruin reconnait Jean-Bart, et s’adressant au payeur incivil, payez, lui dit il, je vous le conseille; c’est Jean-Bart, il ne faut pas plaisanter avec lui. M. Gruin se lève, ramasse la rescription, dit à Jean-Bart de le suivre, qu’il va le payer. Arrivé dans son bureau, il prend des sacs remplis d’argent blanc, et se met en devoir de les peser. Il me faut de l’or, dit Jean-Bart; et M. Gruin, que la peur a rendu complaisant, paie en or.

Quelqu’un ayant montré à l’archevêque de Canterbury une comédie que Foote allait faire jouer, et qui était encore manuscrite, ce prélat fit quelques observations sur la pièce, et releva surtout une expression consacrée à l’éloquence de la chaire, que l’auteur avait mise dans la bouche d’une de ses interlocutrices.—Foote fut instruit de cette critique; il alla chez l’archevêque à qui il protesta, du ton le plus soumis, qu’il n’entendait pas donner le moindre sujet de plainte à l’église, et lui présentant en même temps son manuscrit, il le pria de vouloir bien corriger les expressions qui l’avaient choqué. Celui-ci, qui connaissait Foote et qui se défiait de sa grande docilité repoussa doucement le manuscrit, et dit en riant à l’auteur; “Vous voudriez bien pouvoir publier une comédie revue et corrigée par l’archevêque de Canterbury.”

Un gentilhomme racontait qu’il avait reçu un soufflet: “Cette affaire a sans doute eut des suites!” lui dit on. “Certainement elle en a eues,” reprit il, “car huit jours après, j’avais encore la tête enflée comme une boisseau.”

L’HEUREUX EXPEDIENT.

Jusqu’aux genoux, trois puissants villageois

Tenaient Lucas enfoncé dans la glace,

Qui réniflant et soufflant dans ses doigts,

Faisait très laide et piteuse grimace:

Eh! mes amis, pour Dieu, faites lui grâce,

Dit un passant, qui plaignait le pitand.

“Maître,” répond le sacristain Thiband,

“De notre bourg c’est demain la grand’ fête:

J’y chanterons l’office en faux bourdon;

Et ce gros gars qui crie à pleine tête,

Je l’enrhumons pour faire le basson.”

TACHYGRAPHIE.

La Tachypraphie, ou Tachéographie ou Sténographie, est l’art d’écrire aussi vite que la parole. Le premier ouvrage qu’on ait eu sur cet art avait été imprimé à Paris en 1685: il était écrit en latin, et son auteur se nommait de Ramsay. C’est de Samuel Taylor, Anglais, que nous tenons les principes de la tachygraphie: ils ont été accommodés à notre langue, dans un ouvrage de M. Bertin, intitulé: Systême universel de Sténographie, ou manière abrégée d’écrire, adaptée à la langue française, d’après la méthode de Taylor.—Petit Dictionnaire des Inventions.

Un fabricant d’instrumens de mathématiques de Paris, nommé Conti, a conçu l’idée d’un instrument portatif, qu’il appelle Tachygraphe, au moyen duquel une personne peut écrire, ou plutôt imprimer, aussi vite qu’une autre peut parler. Si un tel instrument pouvait être amené à perfection, de quelle utilité ne serait-il pas à ceux qui rapportent les débats du parlement, &c: M. Conti, cependant, comme beaucoup d’autres hommes de génie, est loin d’être riche. Il compte que le coût d’un seul tachygraphe sera de six cents francs, et il s’est adressé à l’académie des sciences pour en obtenir une aide pécuniaire. Sa demande a été référée à un comité, qui a fait un rapport très favorable.—(Journal Anglais.)

ADRESSE

Des Enfans des Écoles du Séminaire à Mr. le Curé d’Office.

Sur l’air: Voulez vous suivre un bon conseil.

 

Voici, cher père, un jour nouveau;

Ce jour, tu nous es redevable;

Satisfais ton petit troupeau,

Pour que l’an lui soit favorable.

En retour, nous ferons des vœux,

Le ciel sera notre comptable;

En retour, nous ferons des vœux,

Pour que tu sois toujours heureux. (Bis.)

 

En agréant de notre cœur

Le timide et sincère hommage,

Sois toujours notre protecteur,

Et l’ami de notre jeune âge.

En retour, nous ferons des vœux,

Un tendre amour nous y engage,

En retour, nous ferons des vœux

Pour que tu sois toujours heureux. (Bis.)

 

Puisse bientôt le digne objet,

Dont la longue et pénible absence

Excite ton juste regret,

Te consoler par sa présence.

Tous pour lui, tous forment des vœux;

L’amour l’appelle avec instance;

Tous pour lui, tous forment des vœux

Pour que son retour soit heureux. (Bis.)

PETITE CHRONIQUE CANADIENNE.

PORTRAIT DE L. J. PAPINEAU, ECR.

Par un avertissement daté du 6 de ce mois, M. M. E. R. Fabre & Cgnie annoncent que, “d’après le désir d’un grand nombre de citoyens respectables de Montréal et de Québec, Mr. James, (peintre américain,) s’est engagé à tirer le portrait de Mr. Papineau, Orateur de la Chambre d’Assmblée, et de le faire graver dans le plus haut style, aussitôt qu’un nombre suffisant de sousscripteurs se sera offert.”

Nous devions déjà aux soins de Mr. J. Viger le portrait en miniature de l’honorable C. M. de Salaberry, (Voyez Bib. Can. Tome II. No. 6;) celui de Mr. Papineau en sera le pendant, et les salons ou les cabinets des personner aisées parmi nous pourront désormais s’orner des portraits de deux Canadiens qui, par un mérite et des talens supérieurs, quoique dans des genres différents, paraissent s’être acquis l’estime générale de leurs compatriotes; dent l’un s’est illustré dans le noble métier des armes, et l’autre dans la carrière épineuse de la législation et de la politique.

C’est au même Mr. James que nous devons le portrait en miniature de feu Mgnr. Plessis.

La liste des souscripteurs pour le portrait de Mr. Papineau, chez M. M. Fabre & Cgnie, est déjà très considérable. La souscription est de 5s.

PUBLICATIONS.

L’ouvrage de Mr. le Dr. Labrie sur la Constitution Anglaise, annoncé dans notre numéro de Septembre dernier, a paru dans le cours du présent mois, et a réalisé, sinon surpassé l’attente du public. Sil n’y en avait pas déjà de sept à huit cents exemplaires de répandus dans la province, nous aurions cru devoir transcrire ici une partie au moins de l’Introduction, qui nous a paru aussi correctement et même élégamment écrite, qu’elle est raisonnablement pensée, suivant nous, à l’exception, peut-être, d’un peu trop de sévérité contre l’auteur de l’Esquisse de la Constitution Britannique, publiée dans le Tome IV de la Bibliothèque Canadienne.

On a republié, dans ce même mois, en un pamphlet de 48 pages in-12, la traduction du discours de L. J. Papineau, écuyer, aux électeurs du quartier ouest de la ville de Montréal, déjà publiée dans le Canadian Spectator.

Le présent mois a aussi vu paraître deux nouvelles gazettes, le Star ou l’Étoile, publiée à Québec, dans les langues anglaise et française; et l’Examiner, publiée à Montréal, en langue anglaise. Ces gazettes, d’après ce que nous en avons entendu dire, sont rédigées, au moins jusqu’à un certain point, dans un esprit de modération et de conciliation; avec cette différence pourtant, que la première paraît pencher un peu du côté de l’administration, et l’autre du côté de l’opposition.

LES DAMES DE LA CHARITÉ DE MONTREAL.

Une institution bien louable vient de s’élever en cette ville:—Les Dames Canadiennes se sont formées en société, sous le titre des “Dames de la Charité de Montréal.” Leur but est de secourir les malheureux, indigens et infirmes, pendant la saison rigoureuse. Leur première assemblée s’est tenue Mardi dernier, chez Madame Côté. Des sommes considérables ont été souscrites et la Société s’est organisée en nommant ses officiers. Mdme. la Baronne de Longueuil, est appelée à la présidence; Mdme. de Lotbibiere a été élue Vice-Présidente, et Mdme. Laframboise Secrétaire. Les dons et souscriptions sont reçus par Mdme. Côté, nommée Trésoriere. Le Comité choisi des différents quartiers de la ville et des fauxbourgs, doit en outre faire des collectes, sous peu de jours.

Pour seconder les vues bienveillantes et philantropiques de nos dignes concitoyennes, nous ne devons pas hésiter, s’il le faut, à retrancher quelque chose sur nos jouissances, puisque celles que nous éprouverons en soulageant l’humanité souffrante, nous dédommageront amplement des faibles sacrifices que nous pourrons faire. Le même motif doit puissamment exciter l’industrie de toutes les classes. Une économie bien réglée une attention soutenue et une application constante et raisonnée aux affaires de son état, mettront chacun de nous à même de porter son offrande. Le degré d’aissance qu’ont acquis une foule d’individus en cette ville, sans avoir jamais embrassé de grandes affaires, mais uniquement par l’effet d’une stricte économie et d’une conduite sage, démontre invinciblement qu’avec une industrie plus développée, il serait facile d’atteindre à un degré de prospérité qui, se manifestant par la formation d’institutions publiques et nationales, éleverait notre caractère et augmenterait notre importance, tout en nous attirant le respect et l’admiration des étrangers.—La Minerve du 24 Décembre.

GAMOLOGIE ET NECROLOGIE.

Marié:

A Québec, le 31 du courant, par Mgnr. l’Evêque de Fussala, François Roy, écuyer, Avocat de Montréal, à Dlle. Alzire Romain, fille de François Romain, écuyer, de Québec.

Décédés:

A Berthier, le 7 du courant, Antoine Henault, écuyer, âgé 66 ans:

A Terrebonne, le 19, à l’âge de 57 ans, Dame Marie-Anne Raby, veuve de feu Jacob Jordan, de son vivant seigneur de Tenebonne.


ERRATA.

Dans le dernier numéro, à l’article Petite Biographie, &c. au lien de Croï-Sobre, lisez Croï-Solre.

Dans le même numéro, en annonçant le décès de Mr. dé Bilury, nous avons dit qu’il fut Capitaine au corps des Votigeurs Canadiens: il fallait dite, des Royaüx-Canadiens-Volantaites.

Dans le présent numéro, page 8e, renversez l’ordre des vers 21 et 22, et lisez:

A des efforts de ma part redoublés,

A mon estime, à ma reconnaissance.

TRANSCRIBER NOTES

Mis-spelled words and printer errors have been corrected. Where multiple spellings occur, majority use has been employed.

Punctuation has been maintained except where obvious printer errors occur.

[The end of La Bibliothèque Canadienne, Tome VI, Numero 1, Decembre, 1827. edited by Michel Bibaud]